Coup de gueule d'une « intello précaire »

Publié le par Le Torchon Rouge

 

L'intello précaire est un travailleur hard-discount. Il est auteur, éditeur en free-lance, journaliste pigiste, correcteur, photographe aussi, selon la définition de Anne et Marine Rambach qui récidivent dans un nouvel ouvrage « les nouveaux intellos précaires ».

Il cumule plusieurs de ces « statuts » qui ne connaît pas les RTT, les remboursements de frais, les congés payés, les tickets resto, ni les arrêts-maladie.

Moi aussi, j'en suis. Moi aussi à 32 ans je fais partie de cet ovni social depuis 5 ans dans la presse écrite.

 

« Marre d'être au rabais : est ce moi qui délire ou les journalistes sont payés au rabais ? » Non, tu ne délires pas Miss Tigri, pseudo d'une journaliste qui pousse un coup de gueule sur un forum spécialisé.

De quoi te plains-tu ?

Tu devrais être heureuse d'être payée 50 euros le feuillet, ou 60 lorsque certaines rédactions sont généreuses et soucieuses du sort de « leurs pigistes » bien aimés qu'elles appellent le jeudi soir vers 19h pour couvrir une soirée-débat à Castanet, en banlieue toulousaine, à laquelle participe le rédacteur-en-chef ou encore à minuit un mardi car il y a une alerte à la bombe. Et tu t'entendras dire : « Non tu ne me déranges. Pas de souci, je me lève avec plaisir, je ne dormais pas de toute façon ».

Ben oui, c'est vrai, de quoi te plains-tu Miss Tigri ? Tu as quelques piges que tu te dois de conserver et pour 50 euros brut (j'oubliais le « brut », soit environ 40 euros net), tu cherches ton sujet ou bien on te le demande, tu le vends à ta rédaction, tu réalises tes ITV et tu rédiges ton reportage. Allez, au pire t'y passes quelques heures mais avec ces 40 euros gagnés au mérite, tu te payes la moitié de ta facture téléphone ou des... pâtes au beurre !

« Faut se battre, chaque jour », lui rétorque un journaliste installé et de bonne volonté, à qui on a envie de mettre notre main en pleine face. Merci de ton soutien collègue ! Et notre conseiller psychologique, qui a priori ne galère pas, de poursuivre (si si) sans retenue en énumérant les trucs et astuces à accomplir pour « s’en sortir » : « prendre son courage à deux mains, ne pas lésiner sur les efforts, appeler et rappeler, en prenant garde de ne pas ennuyer non plus ses interlocuteurs ». Bah oui ! Faudrait pas non plus les gonfler les rédacteurs-en-chef avec tes coups de fil à répétition passés pour la bonne cause : bouffer !!

A Toulouse comme ailleurs, en presse écrite, comme en radio et télé, les pigistes prennent la porte, un par un. « Désolé plus de budget ! », nous apprend-t-on. Lorsque le rédacteur-en-chef veut bien nous le signifier. Souvent il ne prend pas cette peine, allons donc !  Courageux, il utilise la bonne vieille méthode du laisser trainer. Ne plus donner signe de vie. A ce moment ci, deux autres aventures t'attendent, l'une juridique, l'autre sociale avec le Pôle emploi.
Sans piges et sans boulot, tu te demandes s’il y a encore un avenir dans cette profession, et de la place.

« Ne vaut-il mieux pas vendre des cacahuètes sur la plage ? », s'interroge un journaliste SNJ-CGT d'une autre région.

A méditer.

Une pigiste (encore?) résistante pour Le Torchon Rouge

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